Je courrai sur les quais, mon esprit divaguait, amusé, porté par les émotions. Devant les péniches amarrées sous le jardin des Tuileries, le bouquet de fleurs posé à la proue de l’une d’elles arrêta mon regard. Il me fit réaliser soudainement pourquoi je l’avais nommée ainsi : Rose. L’inconscient a décidé pour moi. Ce prénom m’était apparu sans comprendre le pourquoi. Je ne crois avoir jamais connu de femme se prénommant ainsi. C’est donc la veille au même endroit, précisément, que je l’avais rencontré pour la première fois. Une rencontre étrange puisque, l’instant d’avant, Rose n’existait pas. Sans doute pas. Elle naissait devant moi de mes pensées soudaines, fruit de mon inconscient. Elle naissait et n’avait ni histoire, ni passé. Et un improbable avenir intimement lié à la paresse ou l’euphorie de l’auteur. Un destin lié à ses humeurs aussi, ses joies et ses tristesses, ses évasions mélancoliques. Je ne saurais dire à ce moment précis à quoi ressemble Rose. La vie m’aidera peut-être à la faire exister, à se réaliser. A l’insu sans doute, des compagnons de route, m’offrant innocemment quelque intimité, j’utiliserai vos personnes et les mènerai où bon me semble, revenant vers vous pour quelque rendez-vous. Rose n’a pas d’histoire, mais elle un point de départ. Les quais de la Seine, quelque part entre les péniches amarrées et le jardin des Tuileries…